J’ai reçu les titres d’un nouvel album à paraître du duo Kap Bambino et j’ai ressenti comme un flash, car cette formation est pour moi l’archétype du groupe représentatif de la furie et de la fusion qui agitaient Bordeaux dans les 10 ou 15 premières années du nouveau siècle.
Je me suis retrouvé quittant la rue Mauriac vers cinq ou six heures du matin, trébuchant avec dignité à la recherche de quelque lieu dissimulé où je pourrais me mettre à l’abri des tentations, probablement une excavation pratiquée à environ un mètre en-dessous du niveau de la chaussée, près de la place dite Saint-Michel, à la faveur des travaux en cours.
Si à cette époque, la ville de Bordeaux s’est mise à regorger de groupes à la mode à l’affiche de festivals où aller promener l’été ses bottes créatives Regina Regis et son tote bag, c’est que Kap Bambino avait quand même bien ouvert la voie – avec quelques années d’avance sur la vague « electro punk ».
« Bordeaux c’est un peu un concentré de Shoreditch, mais en France. » m’avait dit en interview la chanteuse Caroline “Khima” France – qui avait vécu à East London et connaissait son sujet. Elle avait créé le duo avec Orion Bouvier (a.k.a GroupGris). Quelques années plus tôt, on avait fait jouer Anah, le groupe d’Orion, à l’Alligator, le bar de la place du Général Sarrail (actuellement l’HMS Victory), du temps où on y programmait des concerts à la cave avec La Ligue Hardcore. C’était de la noise indé dans la lignée de Deity Guns avec look de teufeurs périgourdins en parkas à capuches + amplis à fond.
Kap Bambino est un pur produit de la culture DIY des sous-sols bordelais, résolument branché sur l’électricité (machines + microphone) et donnant l’impression d’avoir synthétisé, en guise d’influences, les ¾ du contenu des bacs du disquaire Total Heaven.

En photo ci-dessus, c’est Kap Bambino live au Café Pompier (la cafétéria des beaux-Arts de Bordeaux), en 2009, shooté par Guillôme Radiôm. C’est extrait d’un flyer pour la promo d’une expo qui a eu lieu à Total Heaven l’année dernière.
C’est tout à fait évocateur, car on peut tout à fait dire de Kap Bambino qu’ils ont été les ambassadeurs naturels du dynamisme, de la créativité, et, osons le dire, du bon esprit de la scène bordelaise. Energie charismatique + son puissant : leur double signature a dû marquer tous ceux qui ont croisé leurs lives. On les a vus partout, autoproduits au Zoobizarre à l’époque de leur label Wwilko, au CAPC pour une soirée d’étudiants Erasmus ayant visiblement mieux à faire que réviser leurs partiels, au Fat Kat avec Vive La Fête ou en come-back triomphant à Barbey pour la release de l’album Devotion.
Archive vidéo ci-dessous : difficile de faire plus bordelais que ce combo Kap Bambino + Heretic Club + soirée labellisée Total Heaven + élèves plasticiens sous MDMA.
Se tenant à l’écart des phénomènes de hype dont ils ont toujours paru se méfier, les KB ont toutefois connu un beau succès. Avec notamment un album sur le label d’autres duos décisifs (oui, je pense à Justice et Amadou & Mariam), des big festivals genre Astropolis, des grandes tournées internationales et un cool numéro « hors série » du magazine Trax, avec des illustrations de Cool Jo et Jean-Louis Costes et The Magnetix sur le CD compil.
Le nouvel album de Kap Bambino s’intitule No Domination. Il sort le 15 mars 2025 sur le label américain Cleopatra (Danzig, Iggy Pop, Ministry). En voici le premier clip, avec des gros beats dance de grosse teuf qui bastonne et plus de corps qui explosent que dans l’oeuvre de Cannibal Corpse :
Choisis ta date, camarade :





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