A visiter à Angoulême : l’expo Rock ! Pop ! Wizz ! Quand la BD monte le son (commissariat : Vincent Brunner et Clémentine Deroudille).
Pour célébrer le riche dialogue entre pop rock et « 9ème art », le musée de la bande dessinée d’Angoulême met sous les projecteurs de remarquables pièces de sa collection, augmentées de nombreux prêts et contributions exclusives, de Dominique A à Zep, en passant par ceux de médiathèques musicales françaises, d’universités nord-américaines et de maisons d’édition historiques.

Dès le premier couloir, en illustration séminale de cette fusion entre art du comics et art du rock’n’roll, on peut admirer la mise en valeur des couvertures que Robert Crumb dessina pour sa revue Zap Comix dans le San Francisco des années 60.
La transmission à la France est notamment montrée en invoquant Gotlib et son Hamster Jovial (paru dès l’année 1971 dans Rock&Folk), Solé et son Magical Mystery Pop publié dans Pilote (1972) et bien sûr le magazine Métal Hurlant, surtout depuis l’arrivée de Philippe Manoeuvre à la rédaction en 1976, véritable explosion de la “BD rock” : aventures du groupe (fictif) Les Closh relatées par Dodo et Ben Radis, du rockeur à banane Lucien par Franck Margerin, du loubard Kebra par Tramber et Jano…

L’exposition ne tombe pas dans le piège de la célébration exclusive d’un âge d’or révolu : elle déroule les années 1990 et 2000, en montrant par exemple Jean-Christophe Menu et ses Lock Groove Comix, Like a steak machine de Fab Caro, les carnets de Luz (filmé en action dans le cadre d’un reportage inédit), Le petit livre rock d’Hervé Bourhis, etc.
Fort heureusement, le rock n’est pas la seule musique entendue, puisque le juke-box audiovisuel est aussi branché sur la chanson, le rap (formidable Hip Hop Family Tree de Ed Piskor) et les musiques de dance floor.

Musique populaires et bande dessinée, toutes deux ont cheminé sur les contre-allées de la contre-culture, suivant le plan incliné de la lente légitimation, jusqu’à leur pleine reconnaissance, disciplines devenues respectables, rentables, méritant études mémorielles et formes de muséification – perdant au passage leur charge subversive, mais ceci est une autre histoire. Riche exposition en tout cas, et stimulante. Au sortir de la salle, on aurait presque envie d’exiger un rappel.
Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, Angoulême (16)
Jusqu’au 31 décembre 2023.
Catalogue paru aux Requins Marteaux (10 €)

Illustration ci-dessus : Jean-Christophe Menu, extrait de Ecchymoses, planche originale, encre de Chine sur papier.
Illustration de couverture : photographie d’une sérigraphie d’après un dessin (sans titre) de Robert Crumb (2009)